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3 août 2011

Le 11 type de la Copa America par Zonal Marking

En cette période d'intersaison assez pauvre en termes de football, ZM propose une liste des 11 joueurs marquants de la compétition majeure de cet été.



Justo Villar (Paraguay)

On n'atteint pas la finale sans prendre ni marquer ni prendre de buts (dans les matchs éliminatoires) sans une bonne performance défensive. La défense à 4 constamment remaniée du Paraguay a été systématiquement impressionnante, mais Villar fut juste superbe. Il a réalisé de fantastiques sauvetages contre le Brésil, dont un tir-au-but, et a recidivé face au Venezuela.

Juan Zuñiga (Colombie)

Joueur utile avec Naples, mais joueur-clé avec la Colombie. Il a contribué aux bonnes peformances d'une défense qui n'a pas été prise à défaut pendant la phase de poules, et a su apporter fréquemment le danger vers l'avant, montrant de bonnes qualités balle au pied.



Sebastian Coates (Uruguay)

Le plus jeune de l'impressionnante collection de défenseurs centraux dont dispose l'Uruguay, et le meilleur sur cette competition. Après le cauchemar vécu par Lugano et Victorino face à Paolo Guerrero lors du premier match, Coates a integré l'équipe pour ne plus la quitter. Aussi à l'aise au marquage dans une défense à 4 que libéro dans une défense à 3, sa présence a semblé apporter beaucoup de sérénité à l'équipe Uruguayenne.

Oswaldo Vizcarrondo (Venezuela)

Un fantastique défenseur de surface. Sans-compromis, engagé, et excellent dans le positionnement. Le Venezuela a souvent dû laisser la majorité de la possession de balle à l'adversaire, mais Vizcarrondo fut la raison majeure de leur sérénité dans ces conditions. Il est aussi monté pour marquer une belle tête dans le quart de finale face au Chili.

Alvaro Pereira (Uruguay)

Pereira a debuté le tournoi sur le banc face au Pérou, les solutions qu'il apporte sur le côté gauche et ses courses offensives faisant cruellement défaut à l'Uruguay... mais il fut par la suite titulaire pour tous les autres matchs. Sa polyvalence fut utile : il peut jouer défenseur gauche, latéral offensif, ou milieu gauche.



Egidio Arevalo Rios (Uruguay)

Un compétiteur acharné au coeur du milieu. Alors que Luis Suarez recevait le trophée du joueur de la finale, c'est l'annihilation d'Ortigoza par Arevalo qui fut à la base de la performance Uruguayenne. Il a été utilisé dans une paire performante avec Diego Perez, mais le carton rouge de ce dernier face à l'Argentine, et la suspension qui suivit face au Pérou, permit de mieux apprécier les qualités d'un Arevalo plus isolé.

Tomas Rincon (Venezuela)

Un milieu de terrain puissant mais aussi doué techniquement, élu meilleur joueur du tournoi. Son sévère carton rouge face au Chili l'a privé de demi-finale, et sans sa force motrice au milieu, le Venezuela a eu beaucoup plus de mal à se créer des occasions.

Juan Arango (Venezuela)

Un autre Vénézuélien qui a montré de belles qualités techniques au milieu, et une grande qualité sur les coups de pieds arrêtés. Ces frappes ont en effet eu un grand rôle à jouer dans cette competition dominée par les balles arrêtées. Cela fut notamment criant sur les deux buts Vénézueliens face au Chili.

Alexis Sanchez (Chili)

Pas tout à fait au niveau qu'il a atteint avec l'Udinese cette saison, mais une menace permanente pour l'adversaire. Il fut aussi à la finition dans des moments importants : un joli but face au Chili, et une passe décisive face au Vénézuela.

Luis Suarez (Uruguay)

Une bonne fin de match (et un but) face au Pérou a permis à Suarez de rester dans le 11 titulaire après que Tabarez ait choisi de passer à 2 attaquants au lieu de 3. Cela lui a donné plus de liberté, ainsi qu'un rôle plus axial, il a alors pu se placer dans les intervalles, recevoir des ballons entre le central et le latéral avant d'aller vers le but. Il a aussi montré une incroyable capacité à gagner des coup-francs et à faire avertir ses défenseurs - en particulier face à l'Argentine, un match où l'Uruguay eût grand besoin de sa malice pour rester en vie.

Paolo Guerrero (Pérou)

L'avant centre "tout-terrain" classique : conservation du ballon, appels dans les intervalles, duels aériens et présence à la réception des centres, Guerrero a été épuisant pour tous ses adversaires, bien que n'ayant que peu de soutien de la part de ses coéquipiers. Lui et Suarez sont les meilleurs buteurs de la competition, mais aussi de loin les meilleurs attaquants.


Autres joueurs méritant d'être cités :

Fernando Muslera (Uruguay)
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Mario Yepes (Colombia)
Diego Lugano (Uruguay)
Dario Veron (Paraguay)
Maicon (Brésil)
Pablo Armero (Colombie)
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Carlos Sanchez (Colombie)
Nestor Ortigoza (Paraguay)
Jorge Valdivia (Chili)
Ganso (Brésil)
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Sergio Aguero (Argentine)
Lionel Messi (Argentine)
Diego Forlan (Uruguay)
Joel Campbell (Costa Rica)

L'article original en anglais (Note : des vidéos supplémentaires s'y trouvent)
L'article en espagnol

31 juillet 2011

Uruguay 3-0 Paraguay : Tabarez fait bien les choses

L'Uruguay remporte sa 15ème Copa America (un record) grâce à une excellente performance pleine de maîtrise.

Oscar Tabarez aime surprendre dans sa composition d'équipe et sa formation, mais il a utilisé le 11 attendu sur ce match, dans un système en 4-4-1-1 que l'on peut identifier comme son choix favori durant ce tournoi.

L'équipe de Gerardo Martino était moins prévisible – il a effectué 4 changements par rapport à la demi-finale remportée face au Venezuela, mais a conservé en gros le même système – un 4-4-2 / 4-5-1 assez restrictif avec Pablo Zeballos effectuant des courses vers l'avant depuis sa position en retrait sur le côté droit (bien qu'il ait parfois échangé ce rôle avec Nelson Valdez).

L'Uruguay a été meilleur sur tout le terrain – plus sûr derrière, plus puissant devant, et surtout, il a remporté la bataille du milieu.


L'Uruguay met immédiatement la pression

Beaucoup s'attendaient à une finale assez lente et ennuyeuse à Buenos Aires, cela a donc dû être un choc pour les paraguayens de se retrouver acculés dans leur surface de réparation dans les premières minutes de jeu. L'Uruguay a mis la pression dès l'entame, obtenant 5 corners en à peine 7 minutes, et se procurant plusieurs occasions durant ce laps de temps – le ton du match était donné, et l'équipe de Tabarez prenait directement le contrôle des opérations.

Comme beaucoup de matchs interessants d'un point de vue tactique, l'enjeu majeur se trouvait être le tempo. Les paraguayens avaient intérêt à jouer sur un rythme lent – calmant le jeu, attaquant tranquillement en donnant presque l'impression de ne pas vraiment chercher marquer, comme l'illustre leur série de 5 matchs nuls durant la compétition. L'Uruguay était plus rapide, plus désireux d'apporter la balle à l'avant, et plus prompt à bloquer Ortigoza.

La bataille eut lieu dans la partie centrale du milieu de terrain, et tourna plus précisément autour de Nestor Ortigoza : c'est un excellent meneur de jeu reculé, avec une grande qualité de passe longue ou courte, et c'est surtout celui qui dicte le tempo paraguayen. Il ralentit le jeu par des passes intelligentes, mais il manque de mobilité, ce n'est pas un joueur adapté à un rythme élevé. Martino le sait et il n'utilise pas Ortigoza quand il a besoin de volume de jeu : il n'a pas été aligné lors du quart de finale face au Brésil, où l'équipe a cherché à exercer un pressing important.

Le fait qu'il ait été aligné cette fois nous dit tout à propos de l'idée de Martino. Il voulait un match lent, et Tabarez en avait conscience. En réponse, Tabarez donna à Diego Perez et Egidio Arevalo la permission de jouer plus haut que d'habitude – peut-être parce que les milieux paraguayens étaient peu offensifs – intervenant ainsi très vite sur les milieux adverses. Arevalo, peut-être le meilleur joueur Uruguayen de cette Copa, fut plutôt actif sur la gauche, et avait donc la responsabilité de bloquer Ortigoza.

L'action du 2ème but – où Arevalo pressa Ortigoza, gagna la balle, puis décala Diego Forlan à la finition – a résumé assez joliment cette bataille tactique. Ce fut assez proche de la façon avec laquelle Yaya Touré a mis en danger Michael Carrick en demi-finale de la Cup. L'intelligent meneur de jeu reculé a besoin de temps avec la balle, tandis qu'un un joueur physique et déterminé tente de l'en priver. C'est souvent de cette façon que la lutte pour le contrôle du rythme se produit au milieu, mais il est rare qu'une telle action débouche directement sur un but.

Manque de largeur

Martino a fait une erreur dans sa composition d'équipe qui a participé à la défaillance d'Ortigoza. Avec Zeballos se déplaçant rapidement dans l'axe – avec, honnêtement, peu d'impact – le Paraguay se retrouvait avec 4 milieux axiaux n'apportant aucune largeur. C'est un gâchis énorme de faire jouer Ortigoza, habitué à distribuer des passes dans les espaces libres, sans avoir aucun joueur capable de se déplacer dans ces zones pour les recevoir.


Les 2 problèmes d'Ortigoza: (1) Le pressing d'Arevalo. (2) L'absence de solutions vers l'avant.

Encore une fois, il s'agit d'une illustration spécifique d'un problème plus général : la volonté du Paraguay de produire un jeu de passe lent, mais en réduisant leur milieu à 4 joueurs alignés couvrant, disons 20m au lieu de 50, cela facilita le pressing uruguayen, et empêcha les guaranis de conserver la balle. Ce n'est pas un hasard si Barcelone écarte au maximum ses joueurs, augmentant la zone de jeu “active” : la bataille du milieu peut être gagnée en dominant numériquement le centre du terrain, mais il faut toujours disposer de solution pour ressortir la balle. Avec aucun joueur permettant d'étirer latéralement le jeu, et un manque d'appels vers l'avant, il est compliqué d'imaginer comment le Paraguay éspèrait porter le danger.

C'est peut-être en fait le cœur du problème : il ne cherchaient pas tant que ça à agresser l'adversaire, le 0-0 les contentait. Concéder le premier but dans ces conditions devenait donc un désastre.

2ème mi-temps

Etrangement, Martino décide de ne rien changer à la mi-temps. Et tout aussi étrangement, le Paraguay revient dans le match. La principale raison est le recul uruguayen. Tabarez a probablement pensé que ses joueurs ne seraient pas en mesure de maintenir un pressing intense sur tout le terrain, et avec les cartons jaunes de Diego Perez, Martin Caceres et Maxi Pereira, cela ne valait pas le coup de continuer d'agresser les milieux adverses très haut. Un second carton inutile (chose fréquente dans ce tournoi) aurait redonné espoir au Paraguay. En outre, Perez semblait totalement épuisé quand il fut remplacé au milieu de la seconde mi-temps. Dans un des rares matchs (de la Copa) joués l'après-midi, la température légèrement plus haute a peut-être joué un rôle.

Evidemment, Ortigoza eut donc plus de temps pour jouer, et il entra dans le match. N'ayant pas de solution sur les ailes, il a cherché à trouver les attaquants. Il le réussit sur une superbe passe pour Valdez, dont la volée à l'entrée de la surface frappa la barre. Par la suite, Ortigoza obtint enfin du mouvement sur les côtés grâce au latéral droit Ivan Piris : une nouvelle passe exceptionnelle, suivie d'un centre à ras de terre de Piris que Riveros aurait du convertir. Ce fut la meilleure opportunité paraguayenne.

A la 65ème minute Martino fait entrer Marcelo Estigarribia sur l'aile gauche, et Hernan Perez à droite, apportant ainsi des solutions permanentes sur les côtés. Caceres et Vera sortent. Le Paraguay semble alors un peu mieux, mais le troisème remplacement est un désastre. Lucas Barrios n'était clairement pas en état de jouer – il ressentit une douleur à la cuisse dés son entrée en jeu – et s'effondra après à peine 5 minutes. Comme pour l'entrée de Roque Santa Cruz en demi-finale, qui conduit au même résultat, cela mit fin aux espoirs offensifs des paraguayens. Par ailleurs ils se retrouvèrent alors ouverts aux contres de la Celeste, et un brillant mouvement entre Cavani, Suarez et Forlan déboucha sur le plus beau but du tournoi, sur sa toute dernière attaque.

Conclusion

Il y a eu, bien sûr, beaucoup d'autres facteurs influents sur le match. Suarez a été peu mentionné ici, mais il a mis la défense paraguayenne en lambeaux : prises d'intervalles, provocation de fautes, conservation du ballon. Son titre d'homme du match n'est pas surprenant, mais en termes de tactique, cela peut être simplement décrit comme un joueur exécutant parfaitement sa tâche habituelle.

La « vraie » bataille tactique tournait autour du tempo au milieu, et était centrée sur Ortigoza. Quand on le laissait jouer (en seconde mi-temps) il était le joueur clé du match. Quand on ne le laissait pas (dans la première) il était un handicap pour son équipe.

Tabarez doit être félicité pour ses décisions au cours du tournoi. Il a utilisé un grand nombre de joueurs (les 20 joueurs de champ ont eu du temps de jeu), des formations variées et différentes stratégies sans le ballon. Néanmoins, presque toutes ses approches ont fonctionné, et malgré un départ timide, les performances de la Celeste en demi-finale et en finale furent deux des plus convaincantes du tournoi.


Article original en Anglais
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