Dans le tirage au sort d'une grande compétition comme l'Euro, après les sempiternels discours et les danses traditionnelles des nations hôtes, la première partie du processus consiste à placer les têtes de séries dans les différents groupes. Comme cela arrive souvent, on avait d'ores et déjà assigné la Pologne au groupe A, et le co-oroganisateur ukrainien au D.
A ce stade du tirage, les commentateurs expliquent en général que le nom du groupe dans lequel on est placé n'a aucun impact, que seules importera le nom des adversaires.
Mais ont-ils raison? Il y a pourtant un avantage clair (que l'on soit tête de série ou non) à être dans le groupe A plutôt que dans le D. Sur ce tournoi, une équipe du groupe A qui atteint la finale jouera 6 matchs en 24 jours, contre 6 matchs en 21 jours pour une équipe du groupe D.
Dans le football moderne, alors que les joueurs sont souvent mis au repos pour leur donner le temps de récupérer pour les échéances importantes, et alors qu'on considère qu'être en Ligue Europa est un handicap significatif pour jouer le championnat, une telle différence de 3 jours ne peut pas être négligée.
Bien sûr, le contre-argument évident est qu'une équipe du groupe D a plus de temps pour préparer le tournoi, et c'est clairement une remarque valable. Mais ce n'est pas un avantage réel étant donné que les autres équipes du groupe -les premiers adversaires contre qui la préparation est déterminante- en profitent également. Il est par ailleurs fréquent d'entendre les joueurs parler de la frustration qu'il y a à regarder les autres équipes jouer pendant qu'on attend encore son entrée dans la compétition
L'Espagne a remporté l'Euro 2008 en étant dans le groupe D (et a répété la performance en Coupe du Monde dans le groupe H) ce qui indique de commencer tard n'est pas une barrière insurmontable. Cependant, le nom du vainqueur final est sujet à trop de variables pour dire que ce seul contre-exemple suffit à détruire la théorie selon laquelle ceux qui commencent en premier sont avantagés.
Le cas particulier des demi-finales
A cause de la structure du tournoi, être dans le groupe A ou B sera particulièrement important au stade des demi-finales. Deux équipes issues des groupes A et B affrontent des adversaires issues du C et du D qui auront eu 2 jours de récupération en moins depuis leurs quarts de finales.
La première demi-finale du 27 Juin mettra au prise une équipe ayant joué le 21 contre une autre qui aura joué le 23. De même, la demi-finale du 28 Juin fait se rencontrer des équipes ayant joué le 22 et le 24. Cette structure a été choisie pour éviter que le tournoi coupé en deux tableaux, empêchant dés le départs certaines combinaisons de finalistes (comme à l'euro 2008 -ce qui tempère l'argument espagnol cité plus haut- ou à la coupe du monde 2002), mais donner deux jours de repos supplémentaires à une équipe est une énorme inégalité à ce stade d'une compétition.
En fait, aucun match à élimination directe ne mettra aux prises deux équipes disposant du même temps de préparation. Le graphe ci-dessous montre combien de jours de récupérations chaque qualifié aura en plus ou en moins que son adversaire à chaque tour.
En raison des nombreuses variations de la structure du tournoi depuis que l'Euro à 16 a été introduit en 1996, il n'y a eu que 2 matchs où les équipes avaient cette différence de 2 jours de récupération : il s'agit des demi-finales de l'Euro 2004. Et à chaque fois, l'équipe avec le plus de repos a remporté le match, le Portugal et la Grèce battant les Pays-Bas et la République Tchèque. La finale a opposé deux équipes issues du groupe A.
Synthèse
C'est au stade des demi-finales que la récupération va devenir un facteur clé, et il vaut alors mieux être issu des groupes A ou B.
En remportant le groupe A, on cumule au total 4 jours de récupération de plus que les adversaires au cours de la phase à élimination directe. En remportant le groupe D, on joue systématiquement avec moins de repos.
NDT : un petit article mis en ligne sur ZM au moment du tirage, mais qu'il faudra garder à l'esprit le jour de la compétition et qui peut être intéressant pour les parieurs. Pour ajouter une note personnelle, j'avais vraiment été marqué en 2004 par la différence apparente de forme physique entre les demi-finalistes... une formule plus équitable serait de faire jouer les quarts de finale sur 2 jours au lieu de 4.